Date de publication :

16/07/2018

Modifié le :

16/07/2018

Réfléchir ensemble sans se diviser

J’ai le privilège inouï d’être née par hasard au Québec. Je suis travailleuse culturelle depuis plus de quinze ans. Je ne suis ni historienne, ni anthropologue, ni sociologue et j’avoue écrire ce texte humblement, si humblement.

Je suis brassée comme vous par les échanges entourant le spectacle SLĀV. Lepage et Bonifassi sont des artistes de grand talent qui ont réalisé ce projet avec leurs cœurs et de bonnes intentions, j’en suis convaincue.

Je suis triste que ce spectacle ait été annulé, triste de ne pas avoir vu, entendue, ressentie, triste donc de ne pas pouvoir en parler ici dans ce texte.

« je porte le souhait que les partenaires […] poursuivent leurs soutiens auprès [des artistes] en saisissant ce moment important pour réfléchir ensemble sans se cacher derrière des politiques ou se diviser »

Je crois sincèrement, à l’instar de Robert Henri, que :
« Toute personne en qui l’artiste vit, devient, quel que soit le genre de son travail, un individu curieux, inventif et audacieux, d’expression originale. Il devient intéressant pour les autres. Il perturbe, bouleverse, éclaire, et ouvre des voies nouvelles vers une compréhension plus juste. Là où ceux qui ne sont pas des artistes essaient de fermer le livre, il l’ouvre et montre qu’il est encore possible d’écrire de nouvelles pages. » (Robert Henri, 1923)

Pour moi, cette œuvre de Lepage et Bonifassi est aujourd’hui une occasion. Une occasion, au-delà des manières et des maladresses des uns et des autres de regarder autrement.

J’ai rédigé ce texte vendredi dernier. Ce matin, La Presse annonçait des « rencontres de dialogues » autour des projets SLĀV et Kanata. Par contre, je porte toujours le souhait que les partenaires, qui ont avec raison confiance en nos artistes et en nos organismes professionnels, poursuivent leurs soutiens auprès d’eux en saisissant ce moment important pour réfléchir ensemble sans se cacher derrière des politiques ou se diviser. Plutôt que de faire collectivement en sorte que ces œuvres soient historiques par leurs titres et leurs échos, je rêve qu’elles puissent éclairer cette occasion de faire mieux ensemble et d’écrire de nouvelles pages.

« La véritable liberté s’insère là où il y a de l’imprévisible et du brassage entre les êtres. Si on était identiques on aurait rien à se dire, d’où la nécessité d’apprendre à se rencontrer. » (Albert Jacquard, 1994)

Dominique Lapointe