Date de publication :

08/12/2017

Modifié le :

08/12/2017

Des événements culturels originaux en milieu rural : une nécessité!

20 h 10, on arrive à Albertville. Le parking de la salle municipale est plein, du monde de partout. On voit des plaques d’Amqui, Causapscal, Lac-au-Saumon, Sainte-Florence, Lac-Humqui, Saint-Moïse, Rimouski… Et d’Albertville, bien sûr, et plusieurs plaques d’Albertville à part ça.

Le village, tout trempe, pèse à peine plus de 200 habitants. Pas sur la 132 ni sur la 195, pour s’y rendre on enjambe des croches, des côtes, des rangs et des carcajous. Qu’est-ce que ça prend pour faire courir le monde là un dimanche soir? Un concert de jazz. De jazz actuel.

Dans la salle, fébrilité généralisée, autant chez les musiciens et les organisateurs que parmi la foule. Une soixantaine de personnes ont été assez curieuses et volontaires pour se laisser attirer par les 25es Rencontres de musiques spontanées et la promesse d’une veillée qui défrise.

Monte sur scène Jazz Mess, mené par Éric Normand. Les courageux dans la salle réalisent très vite, s’ils ne s’en doutaient pas, dans quel engrenage ils ont mis le doigt. Les notes revolent. Les musiciens démarrent les pièces, les échappent, les rattrapent ensuite. Déstabilisant, mais stimulant de constater que la musique peut se pratiquer, et habilement, à des lieues des conventions. De découvrir que les instruments peuvent cracher des choses que l’on n’imaginait pas. La foule accueille le tout avec ouverture.

Après une pause, 90 % de l’assistance tient bon, et on soupçonne le 10 % manquant d’avoir été vaincu non pas par l’originalité de l’offre, mais plutôt par la fatigue ou la perspective d’une nouvelle semaine de travail. Le quatuor Manta prend place, le groove s’installe, les pièces sont ondulantes. Même si la proposition est moins acide, on sent la volonté d’improviser, d’aller plus loin. En conclusion, les spectateurs sont repus et ont l’air heureux. Heureux d’avoir assisté à un spectacle original et de qualité chez eux, dans leur milieu, heureux d’avoir été sortis de leur zone de confort, heureux d’avoir fait une découverte, heureux d’avoir vu du monde, heureux que le village ait vibré d’une vibe nouvelle.

On sort de la salle un peu après la première vague de départs. Coup d’œil autour, cœur de village aux immeubles clairsemés et endormis, absence de toute rumeur témoignant d’une quelconque activité. Un dimanche soir comme les autres, dans l’bois. Comme les autres? Non… On est à fucking Albertville et on sort d’un show de jazz actuel pis il y avait du monde.

On prend le chemin du retour, on pense à ceux qui y croient assez pour organiser ça, en l’occurrence le Comité de développement d’Albertville et Tour de bras. À ceux qui sont convaincus que ça porte des fruits qui se laisseront un jour cueillir, que c’est pertinent et nécessaire d’organiser des événements culturels originaux dans une municipalité isolée de 200 habitants, que c’est du positif pis que ça amène le spotlight sur le village et la région, que c’est pas vrai qu’on ne peut rien organiser de beau, de gros et de différent quand on est petit, et que c’est pas vrai que la culture et les arts émergents ça n’intéresse personne.

On pense à tout ça. Pis on est fier.